Quand j’ai vu le travail de Laura pour la première fois, j’ai pris une baffe. Ses photos m’ont fascinée à la fois par leur esthétisme (le magnifique travail sur la lumière) et par l’émotion qui s’en dégageait.

Je lui ai proposé de se prêter au jeu de l’interview (pas facile pour quelqu’un qui s’exprime plus volontiers par l’image que par les mots). C’est un honneur pour moi de vous faire découvrir cette photographe d’origine anglaise récemment installée à Paris et bourrée de talent !

 Bonjour Laura,

Merci beaucoup d’avoir accepté cette interview et de nous faire partager ton univers.
 

Parle-nous un peu de ton parcours.

Depuis combien de temps exerces-tu ce métier ? Qu’est-ce qui t’a décidé à te lancer ?
J’ai d’abord été graphiste et ai également exercé d’autres métiers créatifs. En 2004, je me suis réorientée vers la photo en faisant un master de photographie à Brighton. Pour moi, la photo est un moyen d’expression privilégié. C’est aussi un métier qui permet de découvrir les gens, de parler de l’humain, mais également d’en apprendre plus sur soi-même.

 Pourquoi être venue à Paris ?
C’est une ville qui m’a toujours fait rêver et fascinée mais je ne pensais pas réellement pouvoir un jour m’y installer.

Et finalement, j’ai eu l’opportunité d’y aller avec mon ami. Paris m’attirait pour son côté culturel, pour son mode de vie, sa beauté, son âme. C’est la plus belle ville du monde.

Un typique bistrot parisien où s’est déroulée l’interview

As-tu rencontré des difficultés en arrivant ici ? As-tu été déçue par rapport à l’image que tu pouvais te faire de Paris ?
Je pense que je n’ai pas été déçue par la ville elle-même. En revanche, je ne pensais pas que cela prendrait tant de temps de s’adapter, d’apprendre la langue, de trouver du travail, de faire toutes les démarches administratives… En tout cas, je n’ai aucun regret d’être ici.

La femme semble prendre une place prépondérante dans ton œuvre ? Quelles sont tes sources d’inspiration ? Quelle vision de la femme souhaites-tu donner ? Par exemple sur la série « A woman’s realm » ?
C’est vrai que beaucoup de mes travaux tournent autour de la femme. Je pense que cela répond aussi à mes propres interrogations.

Pour cette série, j’ai photographié des femmes chez elles (je ne travaille pas avec des modèles professionnels).

Cette série parle de la femme, de sa relation avec son corps, son environnement, le regard des autres et son propre regard sur elle-même. Elle se veut aussi une série intimiste car j’ai beaucoup joué avec les objets du quotidien de ces femmes.

J’ai aussi recherché une image de la femme qui s’accepte, qui ne cherche pas à répondre aux canons de la beauté ou à l’image que les autres ou les médias souhaiteraient donner voire imposer.

 

A qui s’adresse ton œuvre ?
Je ne cherche pas à communiquer vers un public en particulier, même si je pense que mon travail va parler plutôt à des femmes qui s’intéresseront à ces thèmes dans lesquels elles pourront s’identifier. En fait cela peut vraiment s’adresser à tout le monde.

Ta dernière série « Us Alone » met en scène différents couples chez eux. Que peux-tu nous dire sur ce travail ? Quel message souhaites-tu faire passer ?
Quand je suis arrivée à Paris avec mon ami, c’était la première fois que je vivais avec quelqu’un. Je m’interrogeais sur le passage de la vie indépendante à la vie à deux. Je pense que j’ai cherché à savoir comment d’autres couples vivaient cela. J’ai voulu montrer une autre facette du couple différente de l’image romantique où tout est idéal. Quels sont les scènes cachées, les moments de tension, d’ennui ? Mes images parlent des difficultés autour de la communication et de la cohabitation.

C’est aussi sans doute un moyen de transcrire mes émotions, mes doutes, la peur de l’engagement…

 

Quelles sont tes prochaines expositions ? Où peut-on voir ton travail ?
Mon site web est : http://www.laurastevens.co.uk/
Sinon, une prochaine expo est prévue en août en Lettonie. Ce sera la série « Us alone ».
Je prépare une expo à Paris pour 2013

Décris-nous une journée typique de photographe ?
En fait, ça change tous les jours, aucune journée ne ressemble à une autre. J’essaie toutefois d’avoir des horaires, j’ai un atelier où je travaille. C’est la que je fais le montage, le travail sur les images, les recherches, le traitement, etc.

Ensuite, je shoote plutôt en soirée. J’essaie de respecter des horaires mais dans les faits, je peux être assez souple selon mes travaux en cours.

J’ai parfois des travaux de commissions qui peuvent perturber le planning établi donc je dois beaucoup m’adapter. Cela demande une bonne organisation mais j’aime cette diversité entre les projets personnels et les commandes. C’est important de faire des choses variées pour développer ses idées. Il ne faut pas non plus négliger le côté contact, les concours, la communication, les expos ou publications, c’est aussi très important et nécessaire pour pouvoir montrer son travail le plus possible.

Suis-tu la mode ? Travailles-tu dans ce domaine ?
Pas actuellement même si ce milieu m’intéresse et que j’aimerais travailler avec des stylistes, des mannequins, coiffeuses, maquilleuses pour créer un univers, quelque chose de plus « fashion ».

Travailles-tu en studio ? Sur des univers créés de toutes pièces ?
Pour le moment, je travaille rarement en studio mais plutôt chez les gens et j’aime ça. Je suis toujours surprise, les scènes sont souvent intéressantes dans les appartements des gens qui sont de vrais décors finalement.

Encore plus peut-être à Paris car les appartements ont une âme, un charme qu’on ne retrouve pas ailleurs. J’accorde aussi une place très importante aux objets car ils racontent une histoire sur les gens, ils participent à ce que je raconte sur les personnes que je rencontre. J’arrange la scène avec leurs objets, leurs vêtements.

Comment trouves-tu les gens que tu photographies ?
Ce sont le plus souvent des amis, amis d’amis, ou des gens croisés par hasard et qui acceptent de se prêter au jeu !

Peux-tu nous donner quelques-uns de tes produits beauté préférés ?
J’aime bien la marque MAC pour le maquillage, Dr Hauschka pour les crèmes.
Je dois cependant avouer que je n’ai pas forcément de produits phares ou préférés, j’aime ça mais je n’ai pas forcément le temps de m’y intéresser.
De plus, je ne suis pas attaché au fait d’acheter des produits de marque

Où aimes-tu faire du shopping ?
A Paris, j’aime flâner et regarder les belles vitrines. Sinon, j’aime aller dans les friperies de Montmartre, dans les marchés, les vides greniers. En Angleterre, je vais chez Topshop, Zara, H&M. Je mélange facilement le vintage et le « high street » (NB : terme que je ne connaissais pas pour désigner les grandes enseignes).

Lis-tu des blogs ? Quelques noms à citer ?
Je lis les blogs photos mais on peut y passer un temps fou alors j’utilise beaucoup Twitter pour découvrir des articles intéressants ou suivre des personnes en particulier. Quelques exemples :
@jmcolberg @flakphoto @LBMbooks @featureshoot @seymourPrjcts @jonathas

 Pour finir, peux-tu partager avec nous :Un bon plan resto ou de bonnes adresses sur Paris ?
J’aime beaucoup mon quartier, le 9e, où l’on trouve d’agréables bars et cafés, des boutiques un peu inhabituelles, avenue Trudaine, rue des martyrs. Je vais à Kooka Boora (62 rue des Martyrs) pour un café (ils sont parfaits !), au Carmen (34 rue Duperré) pour ses cocktails, au Mansart ou au café du commerce pour l’ambiance typiquement parisienne, au restaurant Pantruche (3 rue Victor Massé). J’aime également la quartier autour du canal St Martin ; l’Hôtel du Nord, le Comptoir Général, le Point Ephémère, ainsi que le bar Ourcq en été.

Un groupe que tu écoutes en ce moment ?
Bob Dylan régulièrement. Mais en ce moment, j’écoute Sharon Van Etten, First Aid Kit, Jon Talbot, Jamie Woon, Beirut, Beach House, Grimes.

Travailles-tu en musique ou dans le calme ?
En musique ! Je suis adepte de « Spotify » ou de podcasts pour découvrir ou parfois pour l’inspiration.

Même pendant un shooting, la musique me donne une ambiance, cela aide aussi les gens à poser à être dans une humeur particulière.

Merci encore Laura et à très bientôt !